Sommes-nous notre corps ?

La question de savoir si nous sommes au moins, notre corps, ne devrait pas faire débat. Notre corps reçoit nos sensations, il est le véhicule par lequel nous interagissons physiquement, émotionnellement et avec notre raison, dans le cadre de l’ensemble des expériences que nous mettons en œuvre dans notre monde singulier.

La question de savoir si notre corps constitue le siège de la conscience en est une autre.

C’est un débat biologique, psychologique, moral, métaphysique, philosophique. Les angles d’approche sont nombreux.

Le débat n’est pas clos.

La question de la conscience et du corps draine avec elle des récits étranges qui ne peuvent pas ne pas poser question :

– Les récits d’expérience de mort imminente, dont ceux qui m’ont été rapportés personnellement, sont parfois très troublants.

– Ceux qui sont revenus de la mort, un chemin de mort qu’ils auraient décidé de ne pas emprunter sur incitation ou pas du monde physique.

– La récurrence et la congruence de certains phénomènes visuels que des personnes rapportent de ces expériences ‘entre la vie et la mort’.

– Les expériences de navigation entre deux états de conscience ou des personnes mourantes affirment avoir vu non seulement leur propre corps, mais aussi sont parfois capables dans ce cadre de faire part avec exactitude de faits qui se passent en dehors de la pièce où leur corps est allongé et qu’ils ne peuvent logiquement avoir observés.

Et aussi des expériences. Je pense a celles de méditation avancée ou le sujet prend conscience qu’il n’est pas ce « Je » de son cerveau.

Je ne peux pas enfin, ne pas mentionner le « Je est un autre », la formule de Rimbaud, volontairement incorrecte et volontairement correcte, qui s’oppose frontalement à la conception cartésienne du Cogito Ergo Sum. Chaque fois que j’ai lu quelque commentaire à propos de ces quatre mots, j’ai rarement été convaincu par ceux-ci et ils me font sourire dans le même temps. Je conserve ma vision à ce propos. Je dirais simplement que le moi est quelque chose d’autre, d’étranger. Je pense que la signification de cette citation ne peut être que vécue (ou pas) et finalement nullement commentée. Si elle est vécue, elle est comprise immédiatement.

En ce qui concerne les définitions de la conscience émises dans certaines disciplines :

En biologie, la conscience regroupe  » le sens de l’éveil, la connaissance de soi et la perception de l’environnement « . Il s’agit d’activités du cerveau, effectivement biologiques. Si ces phénomènes et facultés existent incontestablement, notamment au niveau de la perception, elles ne sont pas comprises dans ce que j’appelle conscience, une conscience qui peut être perçue mais qui n’est pas de l’ordre de l’activité de perception.

Au sens psychologique, la conscience se définit comme la « relation intériorisée immédiate ou médiate qu’un être est capable d’établir avec le monde où il vit ou avec lui-même ». Ce n’est pas ma définition de la conscience non plus.

Au sens moral, elle désigne la « capacité mentale à porter des jugements de valeur moraux […] sur des actes accomplis par soi ou par autrui ».  Ce n’est pas du tout ce dont il s’agit ici.

Objections à la théorie matérialiste de la conscience :

– La matière est inconsciente. La conscience est immatérielle. Si la conscience était le produit de la matière de notre cerveau, il faudrait alors en déduire qu’elle serait illusoire, un artifice de notre cerveau.

– Selon la théorie quantique, un phénomène ne se produit que lorsqu’il est observé.

Or, un homme possède une conscience mais il est aussi conscient de cette conscience. Il y a donc un retour. Il est une émission permanente en provenance de la conscience. Une émission saisissable.

Prenons l’exemple d’une équation à une inconnue que notre cerveau tenterait de résoudre. Cette inconnue étant l’état de notre conscience. Il est impossible de connaitre où en est l’état du calcul et en même temps, son résultat.

En d’autres termes, pour pouvoir être conscient de cette conscience, selon la théorie quantique, il faut l’observer. Des lors, si l’on suit les théories matérialistes de la conscience et que l’on tente de les concilier avec la mécanique quantique, il en résulte que notre cerveau serait à la fois le producteur et l’observateur d’un phénomène  : celui de la conscience. Par voie de conséquence, le cerveau observerait un état conscient qui n’existerait pas encore puisqu’il ne l’aurait pas encore produit avant cette observation. Qu’est-ce qui commanderait alors cette observation consciente de la première conscience ? Si la conscience était exclusivement le produit de notre cerveau, nous nous retrouverions en effet avec des périodes d’indétermination de notre conscience alors que notre conscience, contrairement à tout type d’observation contingente dans le monde matériel, est bien ressentie en flux continu.

Cette incohérence est résolue si l’on considère que le cerveau reçoit l’état d’une conscience située en-dehors de celui-ci et agit comme un récepteur radio.

Ce que j’entends – ce que je n’entends pas par conscience :

– En ce qui concerne la conscience qui recouvrirait mes attachements, mes affects, et mes désirs.  Mes attachements, mes affects, et mes désirs sont contrôlés, produits et reçus par mon cerveau. Ils ne sont pas la nature de ma conscience. Ils ne sont pas non plus le produit de ma conscience. Je peux d’ailleurs les faire disparaitre. Si ma conscience était limitée à des attachements, affects et désirs, je n’existerais plus sans cela. Or, sans attachement, sans affect et sans aucun désir, j’existe toujours.

– La conscience est souvent définie comme l’émergence d’un égo, d’un ‘je’. Au contraire d’un égo, je vis ma conscience comme un agent-pilote d’une pluralité de « Je ». C’est notre « Je » multidimensionnel agissant dans plusieurs évènements dans le même moment. –  vision de l’Univers proche de la Many World Theory d’Everett ou encore du Modal realism de Lewis.

Un Multivers Conscient qui ne connait pas de dimension temporelle mais qui crée une succession d’événements parcourus, observés et donc créés, dans un ordre numérique, bien que se déroulant dans le même ‘moment’. En d’autres termes, une application de la théorie des ensembles, une toile d’ensembles, une toile d’araignée d’événements principaux et secondaires les uns par rapport aux autres, qui assurent tous leur congruence, dans un multivers qui ne cesse de grandir dans le même ‘moment’ unique et primordial.

Ce type de conscience est interdit à n’importe quelle intelligence artificielle, fut-elle douée de la conscience d’elle-même et de tous les attributs de la sensation humaine. On pourrait certes attribuer une illusion de conscience de toutes les consciences ci-dessus à une intelligence artificielle très avancée, mais pas de cette conscience-là.

Conclusion – comment ma conscience voit la conscience :

On ne peut résoudre le problème de la conscience sans le concours de la science physique.

La conscience navigue dans un espace à quatre dimensions. Non pas un espace-temps 4D (3D + T, dimension temps) mais au niveau de la conscience, un Multivers 4D de pur-espace.

Si les événements sont agencés exclusivement dans un espace sans dimension temporelle, seul l’ordre dans lequel ces événements sont rencontrés a de l’importance. L’espace est un espace en quatre dimensions, la quatrième dimension étant celle qui permet à notre conscience de voyager dans cet espace 4d. A l’instant zéro de l’univers, celui du Big Bang, la création de la dimension temps ne me semble d’ailleurs pas possible. Qu’est-ce ce qui pourrait entreprendre une dimension de ce type au moment de cette singularité ? Soit il n’y a que de l’espace ou alors, une superposition de probabilités qui ne nécessite même pas de dimensions spatiales. Le Temps est une variable résultante, de l’observation de l’Espace par l’Espace, de l’observation de l’Espace par la Conscience.

Pour prendre une image, la conscience est donc une sorte de Je primordial qui pilote une série d’ ‘avatars’ à travers un Multi-vers qui ne connait pas le Temps, chacun de ces avatars évoluant dans un Uni-vers cohérent. La conscience navigue dans cette quatrième dimension et elle survole pour chacun de ses ‘avatars’, des états de probabilités, qui une fois qu’ils sont observés par un ‘avatar’ de la conscience, matérialisent l’événement, sa mesure revient alors à la conscience par le biais de la perception et de l’expérience. Les événements sont tous, relativement à leurs ensembles respectifs, com-possibles, et assurent la cohérence de chaque monde singulier.